e-Publishing sur Index Fungorum

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Fouad

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Message par Fouad »
Bonjour à tous,

J'aimerais avoir notamment l'avis de Nico sur ce procédé et ce qu'il en pense ?

Comment sont sélectionnés les auteurs ? On a vu récemment les dérives avec une recombinaison de masse dans Suillellus - On aurait pu aussi tout recombiner en Neoboleus ou autre...

Merci :clindoeil:

Kairos

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Message par Kairos »
Salut Fouad.

Si tu n'as pas de problème avec l'anglais, je te conseille cet article de Michael Kuo: Regarding Names Published as Taxonomic Novelties at Index Fungorum

Il fait justement référence à ce fameux Jaime B. Blanco Dios et à sa publication de 28 "nouveaux" Suillellus en 2015.
Not one shred of supporting evidence is supplied. No materials and methods. No results. No discussion. No references. No way to contact the author. No guarantee that bolete specialists were contacted to review the science, if there was any, behind the new names. No way to know what on earth Blanco Dios is thinking and why he disagrees with Zhao, Wu & Yang

Et l'introduction de l'article rappelle curieusement certaines discussions qui ont animé le forum il y a peu de temps :lol:
“Ne demande jamais ton chemin à quelqu'un qui le connaît, car tu ne pourrais pas t'égarer !” (Nahman de Braslow)
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Fouad

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Message par Fouad »
Merci Kairos ! Cela fait plaisir de penser, un peu, comme M. Kuo !

NSchwab

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Message par NSchwab »
Bonjour Fouad,
Je suis en train d'étudier le sujet plus en profondeur afin de te répondre. Je n'ai pas trop le temps aujourd'hui, mais cela se fera durant le week-end.
Mycologue intégriste radicalisé.

Fouad

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Message par Fouad »
NSchwab a écrit :
Bonjour Fouad,
Je suis en train d'étudier le sujet plus en profondeur afin de te répondre. Je n'ai pas trop le temps aujourd'hui, mais cela se fera durant le week-end.
Ta réponse me convient mieux que celle de Index Fungorum :clindoeil: Prends ton temps, et ne te torture pas trop, ce n'est que des champignons !
Indexf.jpg

NSchwab

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Message par NSchwab »
Introduction
Je me suis documenté sur le sujet et voilà les conclusions que j'en tire. Il est très intéressant de peser le pour et le contre ce type de publications. Je vais commencer par parler des avantages puis des inconvénients.

Avantages
Tout d'abord, le premier avantage et pas des moindres est la gratuité du format. Pour un journal en ligne, cela n'est plus très rare d'avoir des journaux à accès libre ou accès hybride. Aucune charge de publication n'est demandée. Par exemple, pour un article dans Mycological Progress, il faut débourser 2480 € ! On peut largement comprendre le choix de certains auteurs et institutions de préférer publier une combinaison nouvelle de manière sommaire que de débourser autant d'argent dans un article parfois presque superflu. Mais bien sûr, l'indexation, le facteur d'impact et les citations s'en trouvent amoindris.

Il est parfois très difficile de publier un nouveau taxon ou combinaison. Pour les nouveaux taxons, je ne pense pas que cela soit approprié de les décrire dans ce journal. Des journaux ont mis à cet effet en place des sections étant dédiées à la description d'espèces de manière détaillée, mais regroupées ensemble. Citons New and Interesting fungi dans Fungal Systematics and Evolution, Fungal Planet dans Persoonia, Fungal Biodiversity Profiles dans Fungal Biodiversity et Fungal diversity notes dans Fungal Diversity. Notons que ces journaux ont des standards assez hauts et nécessitent une forte expertise en mycologie et sont revus par des pairs, cela permet de garantir une certaine sûreté dans la validité des taxons.

Le troisième avantage est à la fois une force et une faiblesse. Nous n'allons que détailler le côté positif dans le présent paragraphe. Tout le monde peut y publier une recombinaison ou nouvelle espèce. Cela permet de mettre sur un pied d'égalité amateur et professionnels. De plus, il faut noter que les publications sont un minimum relues, pour empêcher une utilisation malveillante du système.

Le journal n'est pas limitant en terme de longueur. Certains fixent des limites et cela peut permettre de ne pas l'excéder en publiant les validations supplémentaires sur Index Fungorum.

Le nom et le taxon est directement indexé dans Index Fungorum et Mycobank (via un import). Il est pratique que ce le soit rapidement, car les bases de données sont mises à jour rapidement par ce biais. Cela permet aussi d'éviter les doublons, synonymes postérieurs et noms illégitimes, les auteurs les consultant communément.

Son plus gros avantage vient en dernier. La facilité de publication est extrême. Un problème est venu avec la phylogénétique. Certains taxons obscurs ne sont pas nommés et sont par conséquent parfois jamais décrit. Cela est dû en partie à la piraterie taxinomique (détaillée en dessous et qui peut être également facilitée). Dans tous les cas, une description sommaire permettant de valider une publication peut-être redéfinie et précisée par la suite, plutôt que de se faire voler la paternité d'une espèce. Également, cette facilité permet de pouvoir faire des changements taxinomiques de manière très aisée. Les oublis de réassignation à un genre peuvent ainsi être très facilement corrigés.

Désavantages
Les scientifiques ne préfère souvent pas inclure certaines espèces dont il leur manque des informations pour une publication de qualité, par peur de se les faire voler. Si ce problème était résolu, la mycologie s'en sentirait grandement améliorée. En effet, des autres mycologues ayant trouvé un taxon identique pourraient aider à la publication de ces espèces cryptiques en collaborant sur la publication et devenant co-auteur. Nous avions vu que les Caloboletus furent publiés par Alfredo Vizzini en 2014. Cette publication était basée sur les publications de multiples chercheurs. Malheureusement, préférant s'assurer de la validité de leur genre, quelqu'un leur est passé devant et a publié à leur place ce nouveau genre.

Ce que nous avions vu avec les Suillellus est franchement un cas minime de vandalisme taxinomique (probablement involontaire). Les vandales taxinomiques sont des personnes qui recombinent ou décrivent des taxons de manière anarchique par rapport à la nomenclature en vigueur, mais pourtant valides. Cela provoque une anarchie dans un groupe de taxons, de manière plus ou moins grave et se répercute également sur la nomenclature. Cela pourrait être une voie pouvant être utilisé par ces derniers. Parlons maintenant du cas le plus extrême que je connaisse. Voici une petite entrée en matière issue de publications scientifiques
Oliver et Lee, 2010 a écrit :
Les publications non relues par des pairs de Dewanand Makhan ont semé le chaos dans la taxinomie du groupe le plus divers d'animaux existant (les coléoptères) durant plus de 20 ans, de manière suffisante à lever une protestation signée par 120 scientifiques à son université employeuse, dans laquelle il était technicien en anatomie du bois.
Bolton & al., 2008 a écrit :
L'année 2007 a vu la publication de ce qui est l'une des publications les plus inadéquates qui n'a jamais été produit dans la taxinomie des fourmis. Ce papier, par Makhan (2007), pense présenter six nouvelles espèces du genre de fourmis Pyramica Roger, en provenance du Suriname.
Je pense que cela suffit pour introduire ce personnage haut en couleur. Notons tout de même que les noms donnés aux espèces sont tout autant voir plus compliqués que ceux que donnent de réels scientifiques (exemple : Soesiladeepakius aschnae, dédié à sa fille ou Hawkeswoodoonops rishwani, dédié à son fils) et sont presque tous nommés en l'honneur de ses proches (réponse à Nommo pour son intervention dans le sujet "Référentiel du forum Champis.net" :lol:). Cette personne a donc fait perdre de nombreuses connaissances entomologiques en obligeant les chercheurs à corriger ses erreurs grotesques. Toute cette énergie et cet argent dépensés pour ceci aurait pu être investi dans de recherches bien plus importantes et auraient permis des découvertes. Sans compter que les publications sont effectuées dans des faux journaux scientifiques (pourtant valides pour les taxons). Ces journaux présentent des conflits d'intérêts nombreux (éditeur étant le contributeur principal de son journal, répond aux critiques et attaque d'autres scientifiques dans son propre journal dont une critique étant... la publication d'attaques personnelles dans ses journaux). Je ne vais pas plus vous gâcher le plaisir de la découverte de ce feuilleton digne d'une mauvaise émission de téléréalité et vous laisse vous documenter dans la partie bibliographique en dessous, c'est extrêmement intéressant et divertissant. Si vous souhaitez publier un article scientifique de qualité, il suffit presque de faire l'exact contraire de ces messieurs. Notons tout de même que je ne pense pas que ces gens pensent à mal en faisant ce type de publication. Il pensent généralement originellement sincèrement aider la communauté scientifique et être des génies incompris (syndrome de Galilée). Ils sont en réalité dans le dénis face à leur incompréhension du monde scientifique et de l'incompatibilité de leur publications avec celui-ci. Leur exposer leur contradictions peuvent leur faire perdre le contrôle d'eux-même facilement.
Un autre groupe ayant fait l'objet de tels problèmes sont les orchidées. Ces fleurs attirant fortement le grand public, de nombreux amateurs se sont essayés à la publication de nouvelles espèces, malheureusement pas toujours dans le respect de la pratique scientifique. Parfois également par question d'honneur. Il est tentant d'avoir une espèce à son nom et cela de manière pérenne, mais cela conduit souvent a des travaux de qualité inférieure. Malgré tout, il faut savoir que les amateurs sont une grande force. Certaines ayant fait un travail d'excellente qualité comme celui cité dans un article de "Nature", étant Carlyle Leur a publié plus de 30 monographies assidûment rédigées à propos de la famille des Pleurothallinidae de tous les États-Unis (Borrell, 2007).

Les descriptions de nouvelles espèces ne devraient pas être autorisée par Index Fungorum dans leur journal. Le manque d'informations incorporées à la description d'espèces mène à des espèces fantômes (nomen ambiguum). Les photographies ne sont également pas incluses dans le papier (en tout cas, pour toutes celles que j'ai consulté jusqu'à maintenant) et empêche parfois de parfaire la description du taxon. Les photographies sont très importantes, car les mycologues amateurs s'en servent beaucoup pour leur détermination et également pour les scientifiques, qui s'en servent en quantité pour illustrer les critères microscopiques considérables.

La revue n'est pas relue par des pairs. Tout du moins, à ma connaissance, seul Paul Kirk, l'éditeur, relit les propositions. Cela peut poser des problèmes, car aucun expert externe n'est mandaté pour déterminer de la valeur scientifique des publications.

Conclusion
Cet outil de publication est pour moi très puissant. Malheureusement, il n'est pas assez encadré et parfois, des erreurs peuvent s'y glisser. Pour ce qui est du vandalisme taxinomique, il existe d'autres voies de publication permettant très facilement d'arriver au même résultat (faux journaux et journaux prédateurs notamment). J'ai déjà utilisé l'e-publishing pour l'inclusion de taxons dont la recombinaison fut oubliée (Schwab, 2019). Si vous voulez plus de détail sur ce sujet, je le ferai volontiers dans un autre message. Je vais conclure sur un conseil. Si vous êtes un amateur et voulez publier une nouvelle espèce (ou plus), contactez un professionnel vous aidant dans votre tâche si vous ne voulez pas être la risée du monde scientifique. Même les plus aguerris peuvent faire des erreurs et omettre des détails, même des chercheurs.

Notes
Dans la bibliographies, les publications possédant un DOI (Digital Object Identifier) ont une URL pointant sur celle-ci. Étant rarement gratuites sur le site de l'éditeur, je conseille de rechercher le titre afin de voir si un copie gratuite existe.
J'ai essayé de rendre le texte plus digeste pour les néophytes en mettant en premier les mots vulgarisé et entre parenthèse les mots plus scientifiques.
Je ne pense pas avoir couvert tout le sujet et ne suis pas expert dans ce domaine. Par conséquent, des erreurs peuvent s'être glissées. Si vous en repérez une, veuillez me la rapporter afin que je la corrige.

Bibliographie et références
Springer Nature (accédé le 31 août 2019). Open Access Journals. (URL)
Kuo M. (2016). Regarding Names Published as Taxonomic Novelties at Index Fungorum. (URL)
Oliver P.M. & M.S.Y. Lee (2010). The botanical and nomenclatural codes impede biodiversity research by discouraging publication of unnamed new species. Taxon 59(4). (URL)
Borrell B. (2007). The big name hunters. Nature 446. (URL)
Agnarsson I & Kuntner M (2007). Taxonomy in a Changing World: Seeking Solutions for a Science in Crisis. Systematic Biology 56(3). (URL)
Jäch M.A. (2007). Vandalism in Taxonomy. Koleopterologische Rundschau 77. (URL
Jäch M.A. (2007). Vandalism in Taxonomy (continued). Koleopterologische Rundschau 77. (URL
Schwab N. (2019). Nomenclatural Novelties. Index Fungorum 409. (URL)
Wüster W., Bush B., Keogh J.S. O'Shea M. & M. Shine (2001). Taxonomic contributions in the "amateur" literature: comments on recent descriptions of new genera and species by Raymond Hoser. URL
Lukic T., Blesic I., Bijana B., & L.I. Bibić (2014). Predatory and fake scientific journals/publishers – A global outbreak with rising trend: A Review. Geographica Pannonica 18(3). (URL)
Beall J. (consulté le 1 septembre 2019). Beall's List of Predatory Journals and Publishers. (URL)

Feuilleton Calodema
Bolton B., Sosa-Calvo J., Fernández F & J. Lattke (2008). New synonyms in neotropical Myrmicine ants (Hymenoptera: Formicidae). Zootaxa 1732. (URL)
T.J. Hawkeswood (2011). Response to criticism by Richard Glatz on the Internet regarding the journal Calodema, Dewanand Makhan and Trevor J. Hakweswood. Calodema 157. (URL)
T.J. Hawkeswood (2017). Papers, books and other research of Trevor John Hawkeswood. (URL)
Kabir A., Makhan D. & Hakweswood T.J. (2019). Famous people who have kept pigeons -a brief history. (URL)
Jäch M.A. (2007). Vandalism in Taxonomy. Koleopterologische Rundschau 77. (URL
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Fouad

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Message par Fouad »
Bonjour à tous :clindoeil:

Merci Nico pour tous ces détails techniques. Reste la question du comment Index Fungorum (Paul Ouais Kirk?) sélectionne les auteurs autorisés à publier ? Car, ce qu'il faut savoir est que des sites mycologiques de références, réputés sérieux, se trouvent "obligés" de mettre à jour leur nomenclature, en se basant sur I.F. ou M.B., et de cela résulte des noms actualisés fantaisistes, comme le Suillellus satanas sur Mycodb ! Tu me diras, c'est aux responsables de Mycodb, dans notre exemple, de vérifier le sérieux de la dite publication ?

Pour évoquer rapidement ta publication - parmi d'autres - de Caloboletus roseoolivaceus (Blm.) Schwab. Après quelques recherches et avis demandés, notamment la consultation de la liste des récoltes et vérification de la nature des sols dans l'Essonne, autour de Dourdan, lieu supposé de la découverte de l'holotype de Blum, il apparait que ce bolet soit inconnu ! On ne peut que conclure, selon moi, que c'est un calopus dans une de ses variations.

NSchwab

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Message par NSchwab »
Fouad a écrit :
Bonjour à tous :clindoeil:

Merci Nico pour tous ces détails techniques. Reste la question du comment Index Fungorum (Paul Ouais Kirk?) sélectionne les auteurs autorisés à publier ? Car, ce qu'il faut savoir est que des sites mycologiques de références, réputés sérieux, se trouvent "obligés" de mettre à jour leur nomenclature, en se basant sur I.F. ou M.B., et de cela résulte des noms actualisés fantaisistes, comme le Suillellus satanas sur Mycodb ! Tu me diras, c'est aux responsables de Mycodb, dans notre exemple, de vérifier le sérieux de la dite publication ?

Pour évoquer rapidement ta publication - parmi d'autres - de Caloboletus roseoolivaceus (Blm.) Schwab. Après quelques recherches et avis demandés, notamment la consultation de la liste des récoltes et vérification de la nature des sols dans l'Essonne, autour de Dourdan, lieu supposé de la découverte de l'holotype de Blum, il apparait que ce bolet soit inconnu ! On ne peut que conclure, selon moi, que c'est un calopus dans une de ses variations.
Je ne crois pas qu'une sélection soit effectuée. Et le problème est bien entendu là. Mais Suillellus satanas, n'est pas le nom en vigueur actuellement (contrairement à ce que disent )
Caloboletus roseo-olivaceus est effectivement un nomen ambiguum. Dans mon cas, je l'ai déplacé dans le genre Caloboletus, car même s'il ne s'agit que d'une variation de Caloboletus calopus, cela n'est pas logique de le conserver dans le genre Boletus.
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Message par Fouad »
J'ai bien compris ta démarche Nico, mais dans le cas de taxons, formes ou variétés superflues ne serait-il pas judicieux de les oublier et de ne plus utiliser les combinaisons dites justement nomen ambiguum ? Cela éviterait, à mon avis, une inflation incontrôlable de la littérature... Mais là on quitte le sujet.

Merci pour tes explications cher Nico :clindoeil: Je retiens que Index Fungorum et Mycobank sont des sources pratiques mais à utiliser avec précaution et à ne pas mettre entre toutes les mains...

ps: pour satanas j'ai bien vu que Index Fungorum est revenu au binôme de 2014, mais si Mycodb l'a pris pour nom actuel, c'est qu'il l'était à un moment donné ?

NSchwab

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Message par NSchwab »
Fouad a écrit :
J'ai bien compris ta démarche Nico, mais dans le cas de taxons, formes ou variétés superflues ne serait-il pas judicieux de les oublier et de ne plus utiliser les combinaisons dites justement nomen ambiguum ? Cela éviterait, à mon avis, une inflation incontrôlable de la littérature... Mais là on quitte le sujet.

Merci pour tes explications cher Nico :clindoeil: Je retiens que Index Fungorum et Mycobank sont des sources pratiques mais à utiliser avec précaution et à ne pas mettre entre toutes les mains...

ps: pour satanas j'ai bien vu que Index Fungorum est revenu au binôme de 2014, mais si Mycodb l'a pris pour nom actuel, c'est qu'il l'était à un moment donné ?
Il y a deux écoles pour ce genre de taxons. La première a tendance à laisser oublier les espèces cryptiques et une deuxième, à les recombiner en l'attente d'une mise en synonymie explicite.
Tant que l'on ne retrouve pas le champignon en question, il est impossible de prouver qu'il n'existe pas (on peut utiliser l'antilogie "il est impossible de prouver l'impossible" ou tout du moins humainement). Donc pour moi (et d'autres mycologues), jusqu'à ce qu'un type soit examiné ou des exemplaires correspondant à la diagnose trouvés et étant prouvés identiques à une espèce ou relégués à un rang infraspécifique, le taxon est toujours "en vigueur". Le fait de les laisser être oubliés, sans les faire tomber en synonymie rend le genre plus complexe car toujours ces taxons sont toujours valides et "en vigueur". Parfois, une espèce est retrouvée après plus d'un siècle d'oubli ! On peut prendre en exemple Entoloma wynnei décrit en 1872 par Berkeley et retrouvé seulement pour la seconde fois en 1995. Si Machiel Noordeloos n'avait pas fait figurer cette espèce dans Fungi Europaei, alors Alan R. Outen aurait dû fouiller lui-même dans des livres anciens pour retrouver son espèce. Je doute personnellement qu'il l'aurait fait. Les noms peuvent être des nomen ambiguum pour d'autres raisons. La diagnose peut être trop sommaire ou trop vague. Du point de vue technique, une seule phrase est une diagnose valide. Il est alors d'ordre pratique de parler de ces taxons (en tout cas dans les monographies), même de manière brève et en émettant des doutes à son sujet afin d'éviter par un surplus de confiance en soi de synonymiser ces espèces.
Pour ton post-scriptum, MycoDB a gardé le binôme de Blanco-Dios pour une raison inconnue. Peut-être par l'absence de consultation d'études postérieures ? En tout cas, dès 2016, on a recombiné et validé Rubroboletus satanas f. crataegi, donc adopté le genre Rubroboletus (Janda & Kříž, 2016). Ce taxon a d'ailleurs été recombiné deux fois par des personnes différentes de manière invalide dans Index Fungorum :eek:. Cela semble montrer que même Paul "Ouais" Kirk ne relit les manuscrits que pour la forme et non pas le fond.
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Message par Fouad »
Salut Nico et un grand merci pour tes réponses réfléchies et détaillées.

J'ai eu un échange très fructueux avec deux mycologues de la CMME; dont un expérimenté, qui connaissent très bien l'endroit de la récolte de Blum: Dourdan. Aucune récolte n'a été nommée ainsi dans leur fichiers, ni à Dourdan ni aux alentours ! Cela ne prouve sûrement rien ? Mais pour moi, qui ne crois pas aux fantômes, B. roseoolivaceus est un taxon vide :clindoeil:


Ci-après la diagnose retranscrite par mes soins.

B.roseoolivaceus Blm. nov. sp.
Pileo olivaceo, saepissime magis minusve roseo ; stipite elongato reticulato et statura in mentem revocant B. calopodo, sed differt sporis crassis.
Récolte 1202, Dourdan.

(Révision des bolets, in Bulletin de la SMF, 1969)

NSchwab

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Message par NSchwab »
Fouad a écrit :
Salut Nico et un grand merci pour tes réponses réfléchies et détaillées.

J'ai eu un échange très fructueux avec deux mycologues de la CMME; dont un expérimenté, qui connaissent très bien l'endroit de la récolte de Blum: Dourdan. Aucune récolte n'a été nommée ainsi dans leur fichiers, ni à Dourdan ni aux alentours ! Cela ne prouve sûrement rien ? Mais pour moi, qui ne crois pas aux fantômes, B. roseoolivaceus est un taxon vide :clindoeil:


Ci-après la diagnose retranscrite par mes soins.

B.roseoolivaceus Blm. nov. sp.
Pileo olivaceo, saepissime magis minusve roseo ; stipite elongato reticulato et statura in mentem revocant B. calopodo, sed differt sporis crassis.
Récolte 1202, Dourdan.

(Révision des bolets, in Bulletin de la SMF, 1969)
Je vais illustrer ce que je voulais dire avec mon "il est impossible de prouver l'impossible". Deux amis argumentent. Une pense que les Boletus impossibilis existent. Il s'agirait d'une forme très rare de bolet ayant la particularité d'être translucide et former un prisme décomposant le spectre lumineux. La deuxième personne pense qu'il est impossible qu'il existe sur notre terre un tel champignon.
Il dit donc :
"- Pour me le prouver, apporte en moi un exemplaire et je te croirais."
Le premier répond :
"- Jamais ! C'est à toi de me prouver que j'ai tort"
Qui a raison ?

Il s'agit de la deuxième personne, car cette requête est humainement réalisable. Prouver que ce bolet n'existe pas, nécessiterait que l'on fouille toute la Terre de manière simultanée afin de voir qu'aucun exemplaire (mycélium inclus) n'existe. Le premier disant de lui prouver en apportant un exemplaire est bien plus raisonnable. Bien que difficile, l'objectif est réalisable.
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Message par Fouad »
Oui, mais en suivant cette logique, on peut se retrouver avec une quantité d'espèces "vues une seule fois" plus nombreuses que celles qu'on croise tous les jours ! :o)
Puis, je ne dis pas que Blum n'avait pas trouvé un bolet qu'il avait nommé Boletus roseoolivaceus, mais je dis qu'il l'avait mal nommé :clindoeil:

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Message par NSchwab »
Fouad a écrit :
Oui, mais en suivant cette logique, on peut se retrouver avec une quantité d'espèces "vues une seule fois" plus nombreuses que celles qu'on croise tous les jours ! :o)
Malheureusement, c'est le cas. Mais ces espèces, même oubliées le seront. Si on les conserve avant une mise en synonymie formelle, cela le reste moins longtemps.
Fouad a écrit :
Puis, je ne dis pas que Blum n'avait pas trouvé un bolet qu'il avait nommé Boletus roseoolivaceus, mais je dis qu'il l'avait mal nommé :clindoeil:
Je n'avais pas compris ça, désolé.
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