Lepiota ochraceofulva ? Estival, Pyrénées

Ce forum permet de montrer des photos de champignons et de discuter sur leur détermination.

Attention: ces déterminations ne permettront pas une consommation des champignons !!!
39 messages Page 3 sur 3

Y.Courtieu

Avatar du membre
Messages : 33232
Enregistré le : 28 oct. 2012, 18:14
Localisation : Haute-Savoie
Site Internet

Message par Y.Courtieu »
Jean-Paul a écrit :
Le doute, bien sûr, c'est le début de la sagesse… Je ne suis pas spécialisé dans la biologie moléculaire, qui est arrivée alors que j'avais déjà 20 ans de mycologie derrière moi, mais je côtoie et travaille avec ceux qui la manipule et qui sont aussi des naturalistes. Le scepticisme est permis partout, mais je ne voie ici aucune différence dans les applications entre ce nouvel outil et les états morphologiques du vivant. Autrement dit je devrai douter de la même façon de la taille des spores, de l'écologie, des réactions chimiques sur la chair,... La taxonomie peut mettre la clé sous la porte. Quant à la matière noire, sensée permettre la cohérence des systèmes galactiques, je ne vois pas trop ce qu'elle vient faire ici. Elle demeure invisible, indécelable et attend simplement sa validation (ou son infirmation), ce qui ne semble pas être pour demain.
Cela dit, je pense qu'un débat est nécessaire et que les mycologues qui utilisent les outils modernes devraient expliquer clairement la façon dont ils opèrent pour rendre plus crédibles les résultats.
Content de lire la première phrase ! J'ajoute que le doute dont je parle ne doit évidemment pas conduire la taxonomie à mettre la clef sous la porte, mais doit contribuer par contre à la prudence. J'ai déjà entendu des discours expliquant qu'avant la biologie moléculaire, les critères retenus n'étaient pas objectifs. Une telle affirmation m'avait paru et me parait toujours bien imprudente...
La comparaison avec la matière noire n'était là que pour dire qu'il y a d'autres domaines où il arrive que la science s'avance un peu vite dans ses explications des phénomènes : la matière noire pourrait n'être qu'une invention de l'esprit humain. Invention légitime, parce qu'il fallait bien chercher, mais parfois fort imprudemment présentée comme étant évidemment là : on "mesure" son poids dans certaines galaxies... sans savoir si elle existe ???

La découverte de l'ADN est un progrès considérable, mais récent et les recherches que cette découverte engendre sont remarquables. Mais...
Est-ce le Graal, qui prouve ceci, qui prouve cela ... Vous semblez dire que les résultats de la biologie moléculaire confirment les observations morphologiques. Tant mieux, oui ! Mais alors j'en déduis que les observations morphologiques étaient donc déjà objectives et que l'ADN nous permet simplement de les affiner.
Cette présentation-là, plus prudente, dans la mesure où elle n'affirme pas que l'on a prouvé quoi que ce soit, ... me convient mieux :clindoeil:

La notion d'espèce reste encore à mieux cerner, je pense, même à l'ère de l'ADN.
Yves
UN CORPS FROID NE PEUT PAS CHAUFFER UN CORPS CHAUD

Jean Paul

Avatar du membre
Messages : 185
Enregistré le : 26 mars 2010, 22:27
Localisation : Gers 32

Message par Jean Paul »
Y.Courtieu a écrit :
Vous semblez dire que les résultats de la biologie moléculaire confirment les observations morphologiques. Tant mieux, oui ! Mais alors j'en déduis que les observations morphologiques étaient donc déjà objectives et que l'ADN nous permet simplement de les affiner.
Cette présentation-là, plus prudente, dans la mesure où elle n'affirme pas que l'on a prouvé quoi que ce soit, ... me convient mieux

La notion d'espèce reste encore à mieux cerner, je pense, même à l'ère de l'ADN.
Bon, c'est exact, la vie est quelque chose de dynamique (en perpétuelle évolution) et finalement la notion d'espèce a besoin d'une sérieuse remise à jour. Entendons nous bien, les gaulois et même l'homme du Neandertal côtoyaient les mêmes champignons que nous. La génèse d'une espèce est certes variable en durée mais sur une échelle le plus souvent extrêmement longue (cela dépend de différents paramètres) ce qui permet parfaitement d'adapter la nomenclature linnéenne fixiste (c'est vrai) à la théorie darwinienne. La notion d'espèce touche à différents paramètres et sa définition doit embrasser morphologie, biologie et phylogénie. Nous étudions donc un instantané avec tout ses types évolutifs en cours; des espèces établies depuis longtemps adaptées à des milieux précis, d'autres très variables en pleine effervescence mais pas encore séparées et d'autres un peu plus avancées séparées depuis peu et encore très voisines morphologiquement et même d'autres qui sont en cours de spéciation et dont la séparation n'est effective qu'a 20, 30,...ou 90%! Comme l'a dit Andgelo plus haut, la morphologie seule peut être trompeuse car des caractères déterminant dans un groupe peuvent être sans intérêt dans un autre. L'avènement de la biomol vient très heureusement compléter les anciens outils. Dans la grande majorité des cas les anciennes espèces sont confirmées. Dans les cas ou des confrontations mycéliennes ont établie les espèces il y a aussi confirmation par la biomol. Des groupes obscurs, casse tête de génération de mycologues sont parfaitement éclaircis.
Il ya des écueils; études menées avec des marqueurs génétiques inadaptés ou avec un seul marqueur là ou plusieurs seraient nécessaires, conclusions hâtives de l'absence de différences morphologiques, etc… Par contre avancer que les résultats relèvent du point de vue de celui qui les mène est assez fantaisiste, on se demande alors comment plusieurs études réalisées avec différents marqueurs et par différents auteurs aboutissent au même résultat. En phylogénie il faut, pour être le plus précis possible dans l'étude d'un groupe, le plus possible d'échantillons et le plus possibles de marqueurs. Parfois un seul marqueur peut suffire, tout dépend de l'avancement de la spéciation.

Y.Courtieu

Avatar du membre
Messages : 33232
Enregistré le : 28 oct. 2012, 18:14
Localisation : Haute-Savoie
Site Internet

Message par Y.Courtieu »
Jean Paul a écrit :
Par contre avancer que les résultats relèvent du point de vue de celui qui les mène est assez fantaisiste
Ai-je avancé une telle chose ? Si c'est ce qui a été compris, alors j'ai mal dû m'exprimer. Je ne pense nullement une telle absurdité !
Ce que j'avance, c'est que les conclusions que l'on tire avec une célérité et une quantité véritablement impressionnantes, sont probablement prématurées.
Évidemment ce n'est qu'une impression, mais elle est basée sur des observations "statistiques" :clindoeil: .
Il suffit de regarder le nombre de genres revus, le nombre de genres revus et corrigés deux ou trois fois en à peine quelques années, etc...
Il y en a trop pour que cela soit réellement crédible et on peut penser que le "besoin de publier" respectable, certes, mais en soi un peu en marge de la vrai science est la véritable raison de cette inflation, voire avalanche de créations de nouveaux genres.
Pourquoi d'ailleurs s'attaque-t-on surtout aux noms de genres ? Mon explication -personnelle- est plus que cette notion est encore plus floue que la notion d'espèce plutôt que la traduction de la découverte réelle de nouveaux "genres".
Je précise bien entendu que cela n'engage que moi et qu'en outre cela ne signifie nullement que je "mépriserai" toutes ces recherches.
On me fera simplement très difficilement croire que tout cela est complètement justifié scientifiquement parlant: trop, c'est trop !
On aurait peut-être mieux à faire. Par exemple se mettre un peu plus d'accord sur ce qu'on appelle aujourd'hui un genre, compte-tenu des apports de l'ADN, plutôt que de publier des noms de genre à tire-larigot... Voilà, tout net, quel est mon point de vue.
Yves
UN CORPS FROID NE PEUT PAS CHAUFFER UN CORPS CHAUD

Pat-ouillard

Avatar du membre
Messages : 654
Enregistré le : 26 sept. 2012, 11:22

Message par Pat-ouillard »
Yves, je trouyes que ta vision est un peu trop simpliste, et que tu généralises trop les quelques cas évidents de surpublication.

Pourquoi "s'attaque-t-on" aux genres ?
Parce que qu'un certain nombre de genres anciens s'avèrent aujourd'hui constitués à partir de critères qui ont conduit à des regroupements non conformes aux lignées évolutives. Quant UN genre est dans ce cas, c'est-à-dire qu'il inclut des espèces qui relèvent d'autres genres, et que des espèces classées ailleurs seraient mieux a proximité d'un certains nombres des siennes, il faut tout casser et refaire des regroupements. Ainsi, statistiquement", comme tu dis, on va créer plusieurs ( beaucoup) de genres nouveaux, il n'y a pas moyen de faire autrement.

D'ailleurs, contrairement à ce que tu affirmes, on est loin d'"attaquer" tous les genres, il y a des pas mal de genres auxquels on ne touche pas, parce que les anciens ont eu la chance de tomber sur des groupes morphologiquement homogènes, sans pièges ( convergence, etc..). Les cortinaires son très peu "attaqués", le genre Inocybe est monophylétique, et s'il sera probablement élevé au rang de famille, ce sera sans rien casser, juste parce des groupes assez facilement délimitables apparaissent en son sein, et que son effectif imposant justifie une élévation au rang de famille. Certains auteurs ante-ADN ont déjà tenté pareille opération chez les cortinaires, en proposant d'élever les sept sous-genres en genres à part entière.

Il faut signaler que les genres "à l'ancienne", incluant des milliers d'espèces, sont une anomalie si l'on considère la biologie dans son ensemble. Plus l'effectif augmente, plus les genres deviennent des sous-familles, puis des familles etc., naturellement pour ainsi dire, sauf en mycologie . Ainsi les araignées, un genre pour Linné, est aujourd'hui un ordre comprenant des centaines de genres...Les non spécialistes continuent de dire "araignées", et tout le monde est content....

Quant à certains aller-retours, des genres revus et corrigés, ce sont les modes de fonctionnement habituels en science, le progrès n'est jamais linéraire, il y a toujours des écarts, des erreurs, des retours en arrière, ça a toujours été comme ça. La période pionnière que nous vivons rend ces phénomènes inévitables, il faut donc rester vigilant, certes, ne pas crier trop vite victoire, bien sûr, mais il ne sert pas à grand chose d' occulter les avancées passionnantes qui sont réalisées par ailleurs.

Or, on ne s'est pas attaqué qu'aux genres, contrairement à ce que tu affirmes ! Si tu avais suivi les réformes plus profondes encore qui ont affecté les taxons supérieurs, tu ne dirais pas ça. Les ordres ( terminaison en "ale") on subit des réformes bien plus fondamentales, et qui concernent un nombre d'espèces considérable. Regardes ce qu'on trouve maintenant dans les Boletales , les Russulales, les Aphyllophorales, et tu réaliseras que ce qui se passe au niveau genre est assez raisonnable.
Patrice

Jean Paul

Avatar du membre
Messages : 185
Enregistré le : 26 mars 2010, 22:27
Localisation : Gers 32

Message par Jean Paul »
Y.Courtieu a écrit :
Ai-je avancé une telle chose ? Si c'est ce qui a été compris, alors j'ai mal dû m'exprimer. Je ne pense nullement une telle absurdité !
C'est moi qui n'est pas été clair et je m'en excuse. C'était la remarque de Sylvain qui été visée avec sa référence d'ailleurs un peu curieuse à la dualité onde/particule en physique quantique. Cela dit, cet échange prend une tournure très intéressante et j'avoue que je partage avec Yves une partie de ses remarques sur la notion de genre. Autant l'espèce représente une entité à peu prés appréciable, autant le genre n'a pour support que l'évaluation du chercheur. Certes, il faut que l'ensemble des espèces réunies possèdent en commun une "histoire" et que la branche de l'arbre ainsi caractérisée s'affirme par un support statistique probant. Mais voilà: où placer le curseur? On pourrait faire appel au temps et n'accepter pour genre que les groupes ayant au moins 25 millions d'années mais on se heurte à l'imprécision des arbres utilisant le "divergence time" pour ce qui est des périodes trop récentes (marge d'erreur trop importante). La divergence génétique évaluée par l'utilisation d'algorithmes appropriés permettrait peut être de donner un seuil en deçà duquel la séparation relève de la classification infragénérique et non plus d'un genre autonome. Il me semble à première vue que certains genres récents ne sont guère que des sections si on compare les arbres avec ceux d'autres genres universellement admis (ou pas encore démembrés…). Ici c'est sûr, la prudence est de mise avant d'accepter les nouveaux venus. La fixation de la notion de genre avec une méthode mathématique peut parfaitement s'appliquer étant donner que le genre est lui même une notion arbitraire.

Y.Courtieu

Avatar du membre
Messages : 33232
Enregistré le : 28 oct. 2012, 18:14
Localisation : Haute-Savoie
Site Internet

Message par Y.Courtieu »
Bonjour,

Pour répondre à notre ami Pat'ouillard, je sais fort bien les révolutions apportées aux ordres comme les Bolétales, Russulales, etc...
Je n'ai cité les genres qu'en raison de leur actuelle inflation, qui - je suis peut-être simpliste, j'en conviens, c'est possible :clindoeil: - mais me parait se dérouler de manière assez désordonnée.
Parmi les "simplistes" comme moi, je me permets quand même de signaler au moins deux de mes amis. J'espère qu'ils ne m'en voudront pas. Ce sont entre parenthèses deux auteurs assez bien reconnus dans la communauté mycologique : il s'agit de Didier Borgarino, qui s'est dit "largué" avec la biologie moléculaire. André Bidaud, qui m'a répondu une fois sur ce qui se passe à propos des cortinaires : "je ne dis plus rien..." . Et je ne parle pas des réflexions du même genre lues sur les forums comme meli-melo.
Que nous soyons dans une période pionnière, c'est certain et l'histoire a largement montré que ces périodes se déroulent de manière assez anarchique. Je crois pouvoir dire que c'est le cas en mycologie. Nous vivons une période effectivement pionnière et effectivement anarchique...

Enfin je me permets de poser une question. Lors d'une conférence à laquelle j'ai assisté et que beaucoup ont vue de Pierre-Arthur Moreau, sur la biologie moléculaire, j'ai vu des schémas avec des arbres phylogénétiques sur la gauche, donc des "clades" et autres, numérotés. Sur la droite on voyait les noms latins des classifications "dites anciennes". Ces arbres et ces schémas étaient très clairs. Je ne comprends pas pourquoi il serait absolument indispensable de remplacer les numéros des clades qui étaient sur ces schémas par des nouveaux noms. A quoi cela sert-il en fin de compte, sinon à larguer les gens ou à publier des articles en disant qu'on a créé un nouveau genre.
Pourquoi ne pas se contenter de ces arbres ? Ils situent les anciennes classifications dans les nouvelles de façon simple et claire. Renommer est à mes yeux une complication supplémentaire tout à fait inutile...
Modifié en dernier par Y.Courtieu le 15 juin 2018, 09:01, modifié 2 fois.
Yves
UN CORPS FROID NE PEUT PAS CHAUFFER UN CORPS CHAUD

Pat-ouillard

Avatar du membre
Messages : 654
Enregistré le : 26 sept. 2012, 11:22

Message par Pat-ouillard »
Ahh, ça, ça vient de la théorie de l'évolution. Une fois celle-ci acceptée, on a décidé que la classification des êtres vivants devait respecter les lignées évolutives, d'où les réformes à répétitions qui cassent les anciennes organisations, artificielles, pour les remplacer par les "naturelles". En fait c'est l'inverse qu"'il faudrait faire, nommer les taxons monophylétiques, et numéroter les anciens groupes hétéroclites...
Patrice

Y.Courtieu

Avatar du membre
Messages : 33232
Enregistré le : 28 oct. 2012, 18:14
Localisation : Haute-Savoie
Site Internet

Message par Y.Courtieu »
La logique qui consiste à inverser les choses est une logique scientifique qui ne tient compte ni de l'histoire de la mycologie, ni des hommes qui la font.
Je n'ai aucun mal à accepter qu'il y ait une théorie de l'évolution.
J'en ai beaucoup plus à accepter que celle-ci nécessite des changements de noms, dont je ne saisis pas l'intérêt.
En quoi faudrait-il inverser les choses ? Effacer totalement toute trace du passé ?
Yves
UN CORPS FROID NE PEUT PAS CHAUFFER UN CORPS CHAUD

Pat-ouillard

Avatar du membre
Messages : 654
Enregistré le : 26 sept. 2012, 11:22

Message par Pat-ouillard »
Il n'y a pas de logique de ma part, c'était juste une boutade destinée à signifier qu'en réalité, ce sont les anciens taxons qui ont perdu ( dans les cas avérés de polyphylie, paraphyle etc..) leur légitimité phylogénétique. Rien n'empêche d'ailleurs qui que soit de continuer à utiliser les anciens regroupements, car d'un point de vue pratique, ils conservent leur utilité.
Enfin dans beaucoup de cas, les anciens noms sont conservés, c'est leur contenu qui est chamboulé, parfois aussi leur place dans les taxons supérieurs. à cêté des petits nouveaux, parfois sans doute un peu trop proliférants ( je pense que nous pensons tous au même groupe ;o)) )
Patrice
39 messages Page 3 sur 3